Allègre – GIEC : 1 – 1

"I'm with stupid" La terre et les humainsCela faisait longtemps que Claude Allègre se répandait dans les médias en mettant en cause l’influence de l’Homme dans le réchauffement climatique, les rapports du GIEC, et même l’existence de ce dernier.

Qu’il est facile d’attaquer quand on est ancien ministre, dispose d’une tribune médiatique, et que l’on sait communiquer… Bref, disposer d’armes plus puissantes que l’adversaire. Pour fer de lance, un « livre » (« L’imposture climatique ou la fausse écologie »), toujours dans les meilleures ventes même plusieurs semaines après sa sortie, dans lequel Monsieur Allègre met de côté la rigueur qui doit caractériser tout bon chercheur… Dans un article, Le Monde démonte point par point une partie des éléments figurant dans le livre de l’ancien ministre de l’Education.

Allegre l'imposteur scientifiqueIl faut savoir que Monsieur Allègre n’en est pas à ses premières affirmations qui se sont révélées complètement à côté de la plaque par la suite. « Donner son avis sur tout quand on n’y connaît rien » est une définition qui semble convenir au personnage.

Formidable outil que ce livre : il a permis à Claude Allègre d’écumer les plateaux télé « en promo » pour défendre ses thèses auprès du grand public. D’autant que ces théories doivent lui rapporter de confortables revenus, Monsieur Allegre a tout intérêt à faire parler de lui, quitte à énoncer des contre vérités.

Rappelons que Monsieur Allègre n’est pas climatologue (il est géochimiste) ; écouter ses propos sur la question du réchauffement climatique n’a aucun sens, dans la mesure où ce monsieur n’a pas les compétences requises pour énoncer son avis de façon médiatique sur le sujet. Chacun son métier. C’est dans cette optique, et ne souhaitant plus se faire marcher sur les pieds dans les médias, que des centaines de chercheurs ont cosigné mercredi une lettre ouverte à la ministre de la Recherche, sollicitant son appui.

Une riposte tardive, mais médiatique

400 chercheurs reconnus ont cosigné l’appel. Celui-ci a eu un fort retentissement médiatique. Le voici  :

Mme la Ministre de la Recherche
M. le Directeur de la Recherche
M. le Président de l’Académie des Sciences Mmes et MM. les Directeurs des acteurs de la recherche publique regroupés au sein de l’Alliance thématique AllEnvi (BRGM, CEA, CEMAGREF, CIRAD, CNRS, CPU, IFREMER, INRA, IRD, LCPC, Météo France, MNHN) M. le Président de l’Agence d’Évaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur M. le Président du Comité d’Éthique du CNRS.

Éthique scientifique et sciences du climat : lettre ouverte
Nous, scientifiques du climat, attachés au devoir de rigueur scientifique, interpellons les structures référentes de la recherche scientifique française, face aux accusations mensongères lancées à l’encontre de notre communauté.

Un pacte moral relie les scientifiques et la société. Rémunérés principalement par les crédits publics, les scientifiques doivent déployer une rigueur maximale, pour la conception, la réalisation, la publication de leurs travaux. Leurs pairs sont les arbitres de cette rigueur, à travers les processus critiques de relecture, de vérification, de publication des résultats. Les hautes instances scientifiques sont les garants de cette rigueur. C’est sur cette éthique scientifique que repose la confiance que la société peut accorder à ses chercheurs.

Reconnaître ses erreurs fait également partie de l’éthique scientifique. Lorsqu’on identifie, après la publication d’un texte, des erreurs qui ont échappé aux processus de relecture, il est d’usage de les reconnaître, et de les corriger, en publiant un correctif. Ainsi, des glaciologues ont mis en évidence une erreur dans le tome 2 du 4ème rapport du Groupe d’expert intergouvernemental sur Page 1/17 l’évolution du climat («Impacts, Adaptation et Vulnérabilité, chapitre 10 : Asie») concernant le devenir des glaciers de l’Himalaya. En l’absence de procédure formelle d’«erratum», le GIEC a publié son «mea culpa» ( http://www.ipcc.ch/pdf/presentations/himalaya-statement-20january2010.pdf), reconnaissant l’erreur, et soulignant que les processus de relecture du rapport n’avaient pas fonctionné pour ce paragraphe. En cela, le GIEC a respecté la déontologie scientifique.

Depuis plusieurs mois, des scientifiques reconnus dans leurs domaines respectifs dénigrent les sciences du climat et l’organisation de l’expertise internationale, criant à l’imposture scientifique – comme le fait Claude Allègre dans L’Imposture climatique ou la fausse écologie (Plon, 2010), pointant les prétendues «erreurs du GIEC», comme le fait Vincent Courtillot dans Nouveau voyage au centre de la Terre (Odile Jacob, 2009) et dans des séminaires académiques. Ces accusations ou affirmations péremptoires ne passent pas par le filtre standard des publications scientifiques. Ces documents, publiés sous couvert d’expertise scientifique, ne sont pas relus par les pairs, et échappent de ce fait aux vertus du débat contradictoire.

Ces ouvrages n’auraient pu être publiés si on leur avait simplement demandé la même exigence de rigueur qu’à un manuscrit scientifique professionnel. De nombreuses erreurs de forme, de citations, de données, de graphiques ont été identifiées. Plus grave, à ces erreurs de forme s’ajoutent des erreurs de fond majeures sur la description du fonctionnement du système climatique. Leurs auteurs oublient les principes de base de l’éthique scientifique, rompant le pacte moral qui lie chaque scientifique avec la société. Ces attaques mettent en cause la qualité et la solidité de nos travaux de recherche, de nos observations, études de processus, outils de modélisation, qui contribuent à une expertise nécessairement internationale.

Vous constituez les structures référentes de la recherche scientifique française. Les accusations publiques sur l’intégrité des scientifiques du climat sortent des cadres déontologiques et scientifiques au sein desquels nous souhaitons demeurer. Nous pensons que ces accusations demandent une réaction de votre part, et l’expression publique de votre confiance vis-à-vis de notre intégrité et du sérieux de nos travaux. Au vu des défis scientifiques posés par le changement climatique, nous sommes demandeurs d’un vrai débat scientifique serein et approfondi.

Cette riposte, un peu tardive, est nécessaire, et vient à pic pour remettre à leur place les détracteurs des rapports du GIEC.

Les réactions n’ont pas tardé : La ministre de l’Enseignement Supérieur et de la recherche propose le lancement d’un « débat », quand Claude Allègre, avec la délicatesse qui le caractérise, déclare qu’il « s’en fout ». Il en profite même pour se délecter des ventes de son livre suite à cette riposte des chercheurs.

Comme vu dans un précédent billet, les sceptiques du réchauffement climatique, désormais en première ligne dans les médias, génèrent une crise de confiance à l’égard des scientifiques. Cette remise en question bénéficie en premier aux industrie polluantes, qui voient dans ces débats une occasion de ne pas évoluer vers des pratiques moins nocives.

Il était donc temps d’agir et de ne plus laisser dire des conneries impunément.

Une personne accumulant les erreurs perd, en général, rapidement toute crédibilité.

En sera t-il de même pour Claude Allègre ?

Mme la Ministre de la Recherche
M. le Directeur de la Recherche
M. le Président de l’Académie des Sciences Mmes et MM. les Directeurs des acteurs de la recherche publique regroupés au sein de l’Alliance thématique AllEnvi (BRGM, CEA, CEMAGREF, CIRAD, CNRS, CPU, IFREMER, INRA, IRD, LCPC, Météo France, MNHN) M. le Président de l’Agence d’Évaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur M. le Président du Comité d’Éthique du CNRS.

Éthique scientifique et sciences du climat : lettre ouverte
Nous, scientifiques du climat, attachés au devoir de rigueur scientifique, interpellons les structures référentes de la recherche scientifique française, face aux accusations mensongères lancées à l’encontre de notre communauté.

Un pacte moral relie les scientifiques et la société. Rémunérés principalement par les crédits publics, les scientifiques doivent déployer une rigueur maximale, pour la conception, la réalisation, la publication de leurs travaux. Leurs pairs sont les arbitres de cette rigueur, à travers les processus critiques de relecture,Graphique Grudd allegre de vérification, de publication des résultats. Les hautes instances scientifiques sont les garants de cette rigueur. C’est sur cette éthique scientifique que repose la confiance que la société peut accorder à ses chercheurs. (Ci-contre la démonstration par Grudd du trucage de son graphique par Claude Allègre)

Reconnaître ses erreurs fait également partie de l’éthique scientifique. Lorsqu’on identifie, après la publication d’un texte, des erreurs qui ont échappé aux processus de relecture, il est d’usage de les reconnaître, et de les corriger, en publiant un correctif. Ainsi, des glaciologues ont mis en évidence une erreur dans le tome 2 du 4ème rapport du Groupe d’expert intergouvernemental sur Page 1/17 l’évolution du climat («Impacts, Adaptation et Vulnérabilité, chapitre 10 : Asie») concernant le devenir des glaciers de l’Himalaya. En l’absence de procédure formelle d’«erratum», le GIEC a publié son «mea culpa» ( http://www.ipcc.ch/pdf/presentations/himalaya-statement-20january2010.pdf), reconnaissant l’erreur, et soulignant que les processus de relecture du rapport n’avaient pas fonctionné pour ce paragraphe. En cela, le GIEC a respecté la déontologie scientifique.

Depuis plusieurs mois, des scientifiques reconnus dans leurs domaines respectifs dénigrent les sciencesAllegre du climat et l’organisation de l’expertise internationale, criant à l’imposture scientifique – comme le fait Claude Allègre (photo) dans L’Imposture climatique ou la fausse écologie (Plon, 2010), pointant les prétendues «erreurs du GIEC», comme le fait Vincent Courtillot dans Nouveau voyage au centre de la Terre (Odile Jacob, 2009) et dans des séminaires académiques. Ces accusations ou affirmations péremptoires ne passent pas par le filtre standard des publications scientifiques. Ces documents, publiés sous couvert d’expertise scientifique, ne sont pas relus par les pairs, et échappent de ce fait aux vertus du débat contradictoire.

Ces ouvrages n’auraient pu être publiés si on leur avait simplement demandé la même exigence de rigueur qu’à un manuscrit scientifique professionnel. De nombreuses erreurs de forme, de citations, de données, de graphiques ont été identifiées. Plus grave, à ces erreurs de forme s’ajoutent des erreurs de fond majeures sur la description du fonctionnement du système climatique. Leurs auteurs oublient les principes de base de l’éthique scientifique, rompant le pacte moral qui lie chaque scientifique avec la société. Ces attaques mettent en cause la qualité et la solidité de nos travaux de recherche, de nos observations, études de processus, outils de modélisation, qui contribuent à une expertise nécessairement internationale.

Vous constituez les structures référentes de la recherche scientifique française. Les accusations publiques sur l’intégrité des scientifiques du climat sortent des cadres déontologiques et scientifiques au sein desquels nous souhaitons demeurer. Nous pensons que ces accusations demandent une réaction de votre part, et l’expression publique de votre confiance vis-à-vis de notre intégrité et du sérieux de nos travaux. Au vu des défis scientifiques posés par le changement climatique, nous sommes demandeurs d’un vrai débat scientifique serein et approfondi.

2 commentaires à propos de “Allègre – GIEC : 1 – 1”

  1. Guide aux supporters du groupe des « sceptiques »,
    Les termes de référence de la question du « Changement Climatique » :
    1- C’est tout d’abord une question climatique, et ne peut être traitée que par les méthodes et les outils de cette science ;
    2- La climatologie n’est pas une science orpheline, elle a ses chercheurs qui sont ses garants : elle ne peut être interprétée et présentée que part eux, et c’est entre eux de confronter leurs méthodes et outils dans une parfaite liberté nécessaire à la science, ce qui garanti le développement de la discipline ;
    3- La confusion entre des domaines scientifiques différents est une erreur méthodologique inacceptable : on ne démarre pas en géologie pour atterrir en climatologie ;
    4- La théorie du doute est anti-scientifique : elle remet en doute les avis des autres sans qu’elle soit capable de donner une preuve scientifique. C’est une méthode redoutable et dangereuse, basée sur la psychologie humaine, et fait ravage dans le monde politique et économique ;
    5- Le « climat » est un domaine dynamique et interactif : il a des effets « impacts » sur les milieux naturels qui « s’adaptent », et sur les sociétés humaines qui agissent « politiques » : il faut faire très attention pour ne pas confondre ces trois niveaux :
    – Sciences du Climat ;
    – Vulnérabilité / Adaptation ;
    – Politiques d’intervention ;
    6- A cela il faut ajouter la délicatesse du fil qui relie la science aux médias : on ne peut pas passer directement du laboratoire au public, la communication est de rigueur ;
    Les propos d’Allègre et de Courtillot, qui ne sont pas climatologues, ne respectent pas l’éthique et la responsabilité scientifique et sociale qui leurs imposent d’intervenir dans leurs disciplines respectives, sous contrôle de leurs pairs. Or, quand on ne respecte pas cette norme, on porte atteinte à la crédibilité scientifique, et on induit les médias et les politiques en erreurs : c’est ce qu’ils ont réussi en France.

    Les travaux des géophysiciens et des géologues portent sur une échelle de temps de millions d’années, et font sortir un « cycle » d’évolution entre périodes chaudes et périodes froides, ce qui est théoriquement vrai vu les références dans ce domaine : il s’agit de l’histoire du climat vue sous cette échelle.

    De nos jours, la nature continue d’exercer ses fonctions et n’a pas démissionner, pour ne pas croire que les activités humaines sont les seules responsables dans l’évolution récente, et que les cycles solaires continuent de fonctionner dans leurs rythmes habituels : ceux ci sont des évidences à rappeler.

    La civilisation du pétrole, qui a à peine 120 ans, sur laquelle l’humanité a appris à vivre et a être dépendante, et sur laquelle s’est développée toute l’infrastructure et les systèmes de productions économiques et sociales, ne peut en aucun cas être comparée à l’évolution géologique de la terre : c’est une erreur méthodologique de taille, qui fait des confusions entre les échelles de temps, et qui sont fondamentales dans les études du climat, et ainsi se développe l’illusion chez les non spécialistes et les non avertis.

    Si ces géologues et géophysiciens acceptent de travailler avec les climatologues, ce qui est souhaitable, en se familiarisant avec les méthodes et outils de la discipline, ils admettront que :
    1- Les activités humaines depuis la révolution industrielle (et l’énergie du pétrole) a produit énormément d’énergie thermique, directement ou indirectement, ce qui a alimenté la machine climatique d’une énergie supplémentaire, jadis purement naturelle, solaire et géothermique ;
    2- Cette énergie supplémentaire fait accélérer la machine climatique, et en aucun cas elle remplace les énergies naturelles ou transforme les lois naturelles du climat ;
    3- Cette énergie supplémentaire, accumulée aux énergies naturelles principalement solaires, ne cesse d’augmenter et faire élargir la zone excédentaire intertropicale vers les pôles, qui est observable en continue, ce qui perturbe en profondeur la circulation atmosphérique, et surtout la distribution spatiale des climats de la Terre ;
    4- Cette échelle de 120 ans, dans laquelle s’est effectuée toute cette évolution thermique du climat, est très courte par rapport aux évolutions du passé lointain : ce qui crée une accélération dans les adaptations des écosystèmes, et cause des difficultés aux infrastructures humaines, qui deviennent inadaptées au nouveau climat ;
    5- D’où le gros problème n’est pas celui de l’évolution du climat, mais celui de l’inadaptation des politiques et des interventions humaines qui ne sont pas encore prêtes aux nouveaux écosystèmes globaux.

    Ces précisions nécessaires doivent servir de gare fou pour les « supporters » du groupe des sceptiques et des non avertis, pour que le débat soit relancé sur d’autres normes scientifiques, par des scientifiques qui se respectent. Halte aux illusions !!!!

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